jeudi 28 février 2013

"Je n'ai pas vu mon médecin car je travaille"

Un samedi, lors d'une de mes dernières gardes (soit 24 heures d'affilée), je n'étais pas très disposé. Comprendre que je n'étais pas très conciliant et en avais ras le bol des entrées pour "tout et n'importe quoi".
Bref, je décide d'aller examiner une patiente dont le motif de recours est "douleur au niveau d'une cicatrice de césarienne d'il y a un an depuis 10 jours". Je savais que cela partait mal d'emblée, mais bon, sans vouloir chercher les ennuis, je n'avais rien d'urgent en cours (ce qui correspond à 90 % de mon temps de travail).
Bref, en entrant dans le box, je vois une patiente assise nonchalamment en train de jouer avec son portable. Au premier regard : pas de signes de gravité et une douleur ne semblant pas intense (au premier regard...).
Bref, après m'être présenté, je lui demande ce qui lui arrive
"- j'ai eu une césarienne il y a un an. Et la cicatrice me fait mal
  - depuis combien de temps, lui demandais-je,
  - environ 10 jours,
  - qu'en pense votre médecin ?
  - je n'ai pas vu mon médecin
  - pourquoi ?
  - je n'ai pas eu le temps, je travaille,
  - mais pourquoi venir maintenant ? et ne pas attendre de consulter votre médecin ?
  - parce que je suis inquiète
  - vous n'étiez pas inquiète avant ?
  - si mais je travaillais.

Comme je vous l'ai dit, je n'étais vraiment pas disposé. En général, je ne me prends pas la tête et me dis qu'on est là pour rassurer les gens et je ne pousse pas très loin la discussion. Mais bon, parfois, on en a marre. Cette patiente avait tout le temps de prendre rendez-vous avec un médecin, mais voilà, elle travaille et vient le week-end aux urgences parce que c'est plus facile : pas de rendez-vous, vous êtes sur d'être pris et si il y a besoin de radio, biologie ou avis spécialisé, c'est sur place. Et ben, parfois, je me dis que c'est trop facile et hélas, une personne "paye" pour toutes les autres. On a beau être médecin, avoir de l'empathie pour les gens et aimer notre travail, on est aussi humain et le ras le bol peut nous prendre. Pour preuve : tous les mouvements de démission, de grève en cours dans différents services d'urgence de France.

Faudrait que parfois les gens réfléchissent et se mettent à notre place. Mais cela n'est pas prêt d'arriver.

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