samedi 23 août 2014

Escale Singapour

Deuxième escale dans notre périple pour ramener une patiente en France : Singapour... Après 12 heures de vol. Comme le vol se faisait de jour, difficile de dormir et nous voici à 7h du matin heure locale soit 1h du matin en France sans avoir beaucoup dormi et il nous reste encore 8 heures de vol à faire. Toujours en business class, ouf !!!
Le repas juste parfait, le siège se repliant pour dormir à plat.

Je n'ose pas encore imaginer le retour tout en classe éco...



vendredi 22 août 2014

Direction Auckland


Ça y est, cette fois, c'est parti. Direction la Nouvelle Zélande. Yes. En business
D'abord, escale à Paris avec repos au lounge.... avant d'embarquer sur l'A380... Depuis le temps que j'en révais, l'assistance l'a fait...
Le retour se fait en classe éco avec une patiente en civiére paraplégique et dénutrie. Ce sera plus difficile. Mais je préfère évidemment ça à 24h dans le "couloir de la mort"...

mercredi 20 août 2014

Quand Wolff rencontre Parkinson et White

En Smur, on s'attend toujours et on espère faire des interventions intéressantes qui sous-entend qu'elles sont graves. Ce n'est pas que l'on le souhaite mais il faut avouer que l'on fait ce travail pour cela. Mais c'est malgré tout rare et souvent. Et alors que la fiche d'intervention nous signale un arrêt cardiaque par exemple, il est fréquent qu'il s'agisse en fait d'un malaise, d'une hypoglycémie ou d'une crise convulsive.
Ainsi, lorsque l'on prend le départ pour un arrêt cardiaque chez une femme de 36 ans, nous n'y croyons pas mais malgré tout, il faut faire confiance en la régulation et partir en pensant au pire. Pendant le trajet, un complément de bilan apporté par l'arrivée sur les lieux des pompiers confirme que la patiente de 36 ans est bel et bien en arrêt. Mince, 36 ans, qu'est ce qui a bien pu se passer pour que son coeur s'arrête ? De toute façon, il est clair qu'il faudra la transporter soit pour la mettre sous circulation extra-corporelle soit pour un éventuel prélèvement des organes. C'est triste d'y penser mais hélas, il est nécessaire d'anticiper et cela fait partie de notre travail
Une fois sur place, la patiente est allongée dans son salon avec les pompiers autour sans qu'aucun ne masse. Seul l'un d'entre eux est à la tête pour ballonner. Et pour cause, un pouls a été récupéré après 3 chocs électriques externes. Ouf !! Bonne nouvelle. Les pompiers m'expliquent qu'alors qu'elle discutait avec son mari, elle s'est effondré sans rien ressentir au préalable. Mais elle a récupèré un pouls et une bonne tension. A nous de la stabiliser pour la transporter au plus vite en réanimation. Elle n'a pas été massée tout de suite par son mari mais elle bouge ses bras et a récupéré une ventilation spontanée. Deuxième bonne nouvelle. On la sédate, je l'intube, on la place sous respirateur. Le premier ECG ne m'apporte aucune information sur l'origine de son arrêt. Je remarque que le coeur ne semble pas avoir souffert de son arrêt. Après avoir expliqué les risques au mari qui s'occupait alors de ses jeunes enfants, nous partons vers la réanimation. Je constate pendant le trajet une modification de son ECG : la patiente souffrait d'un Wolff-Parkinson-White, un trouble de la conduction cardiaque qui peut conduire à une mort subite.
Une fois la patiente transmise au réanimateur, on a tous ressenti le sentiment d'avoir fait quelque chose d'important et d'avoir aidé au mieux une jeune mère. Reste à connaitre les séquelles que son cerveau a subi

vendredi 15 août 2014

Nouvelle-Zélande ? Pourquoi pas ?

Et voilà, enfin... Depuis 6 mois que je n'avais pas fait de long courrier, j'ai reçu un appel aujourd'hui pour partir en Nouvelle-Zélande le 22 août. Arrivée sur place le 23 au soir pour un retour dès le 24 en soirée. Arrivée en France le 26 dans la nuit. Passage par Singapour à l'aller. Juste le pied...

Cela va me changer de l'ambulance. Yyeeeaahhhh !!!!

Par contre, retour en classe éco avec une patiente paraplégique en civière. Sous CPAP la nuit. On va avoir du boulot au retour. Mais faut quand même travailler un peu, ce ne sont pas des vacances tout de même.

Je dis juste : "Yyyeeaaahhhh".

Les yeux dans les yeux

On sent bien que c'est les vacances en ce moment. Je n'arrête pas d'enchainer les rapatriements  et les journées à l'hôpital. Faut dire qu'avec ce temps, il n'y a pas grand chose d'autre à faire finalement.

Maintenant que j'ai décidé de changer de service, voilà que j'enchaine les urgences et les smurs intéressants. De quoi presque me faire changer d'avis.

Ainsi, ce jeune homme amené par des ambulanciers pour des douleurs aux membres inférieurs. Sa couleur très pâle incite l'infirmier d'accueil à faire un hémocue : 5g. Allez : admission direct au déchocage. Je l'avais entr'aperçu et je m'étais dit la même chose. En l'examinant, je remarque des œdèmes diffus, au visage, aux mains et aux pieds avec des hématomes dans les zones déclives : déficit probable en protides et en plaquettes ou un trouble de la coagulation. Il est amaigri et supporte très bien son anémie profonde, signe qu'elle doit être très ancienne. Je pense initialement à une insuffisance hépatique, conséquence d'un éthylisme chronique.

" - Vous buvez de l'alcool pendant les repas ?
  - Non, j'ai arrêté il y a plusieurs années."

Mauvaise pioche.

Je remarque que nous avons le même âge et je ne peux m'empêcher de le lui faire remarquer.

" - On a le même âge et regardez, on n'est pas dans le même état. Il y a quelque chose qui ne va pas."

Je sais, ce n'est pas très sympa, mais parfois, je ne peux pas m'empêcher d'être cynique.

Je décide de le transfuser et d'attendre le bilan pour y voir plus clair. Plus tard, son bilan ne m'apporte rien hormis la confirmation de son anémie et d'un déficit en albumine. Son foie et ses reins fonctionnent. Mince, mais qu'est ce qui a entrainé un tel état ? Il est fébrile, mais je ne retrouve aucun point d'appel à une infection. Vu le monde aux urgences, je temporise. La transfusion lui a fait du bien : ses œdèmes ont légèrement diminué et il a repris quelques couleurs. L'infectiologue passant par là, je lui demande son avis. On réfléchit ensemble et au vu du bilan, me parle d'un déficit en vitamine qui pourrait expliquer son anémie. Je retourne alors voir mon patient et lui demande comment il vit.

" - Je suis sous curatelle (il est psychotique et a dépensé un moment beaucoup d'argent ce qui a motivé sa mise sous tutelle)
  - Et vous mangez quoi ?
  - Des pâtes. Je ne mange que des pâtes..."

Et là, bingo. Tout s'explique. Il est juste carencé en tout : protéines, vitamines,... ce qui explique son état qui est apparu progressivement. C'est quand même fou de devenir comme cela. Décidément, il y a toujours des situations nouvelles

Evidemment, il n'est pas le seul à être mal. Les ambulanciers nous amènent également un homme somnolent. Il est adressé par son médecin traitant pour décompensation respiratoire. On a peu de données et son état est critique : comateux, cyanosé des lèvres et des extrémités. Il va falloir prendre une décision rapide. L'infirmier d'accueil m'évoque avec un demi-sourire l'intubation. Je ne sais pas pourquoi, mais à voir le patient, je me dis qu'il est comateux à cause de l'hypercapnie et qu'il doit donc être un insuffisant respiratoire. L'intubation n'est pas forcément conseillée. Il faut que j'en sache plus. Je le mets d'abord sous ventilation non invasive, demande un bilan biologique et radiologique. Par chance, il est suivi dans mon centre hospitalier. Je prends du temps pour me pencher sur son dossier. Il est bien insuffisant respiratoire sous 7l/min d'oxygène la journée et sous VNI la nuit. Il a donc déjà un traitement optimal et est en bout de course. Il a également déjà été hospitalisé en réanimation et son dernier passage dans l'unité se termine par cette phrase : "il serait licite que ce patient ne retourne pas en réanimation". Tout est dit. Une chose est sure : il ne faut absolument pas que je l'intube. Car en plus de me faire "engueuler" par les réanimateurs, ce ne serait pas un service à rendre au patient, car on ne pourrait probablement pas le sevrer du respirateur. Mais maintenant, il n'est pas vraiment amélioré par la VNI et les aérosols et je ne sais plus quoi faire. Je suis quand même contraint d'appeler les réas, ne serait ce que pour confirmer la limitation des soins. Le spécialiste confirme mon diagnostic et ne voit pas non plus ce que l'on va pouvoir faire de plus. Cela ne me rassure pas et je n'ai toujours pas trouvé de place où hospitaliser mon patient toujours dans un état critique. Passons aux pneumologues. Je les appelle. Ils connaissent bien le patient et acceptent de le prendre en charge en me disant que de toute façon, il va mourir.

" - As tu prévenu sa famille ?
  - Non, pas encore...
  - Faut que tu les appelles et tu leur parles de son état
  - Ok, je leur dit qu'il est pas bien
  - Non, non, tu leur dis qu'il va mourir
  - ..."

Bien sur, je ne le connais que depuis quelques heures et c'est à moi, un parfait inconnu à annoncer à sa famille sa mort et au téléphone en plus. Bien sur, je ne l'ai pas fait. On ne peut pas et ne doit pas procéder comme cela. J'ai parlé de son état critique et de la nécessiter de venir rapidement... C'est aux spécialistes d'annoncer l'issue inévitable et cela les yeux dans les yeux !!!

mardi 5 août 2014

Faut pas se plaindre

La semaine dernière, j'ai enchainé 5 rapatriements et cette semaine, il a suffi de 24h aux urgences pour que je me sente naze.

Ce qui est dommage en ce moment est que je ne fais que de l'ambulance (en rapatriement j'entends), pas de vol long courrier. Quelques retours en avion après avoir déposé le patient heureusement, histoire de profiter du salon air france, de grappiller quelques miles sur ma carte flying blue gold (rien que ça, mais plus pour très longtemps si je ne fais pas un long courrier cette année).

Au moins, j'ai fait quelques rencontres intéressantes : alors qu'un patient était assez ennuyeux, les ambulancières étaient agréables et surprenantes : la jeune était musicienne, joueuse d'alto (équivalent à un violon, mais sur le coup, je n'ai pas osé demander) et désirait devenir luthier (c'est pas commun). Elle m'a longuement expliqué que le concours d'accès à l'école était difficile et qu'elle avait décidé de tenter sa chance à l'étranger mais il lui fallait pour cela de l'argent, donc un métier sans formation longue, donc ambulancière. Elle m'expliquait comment un violon se fabrique, quel bois utiliser, le temps de séchage, les différentes pièces à réaliser... Cela peut sembler ennuyeux, mais elle était passionnée et c'était captivant de l'entendre parler de sa passion. Fabriquer des violons, c'est pas commun... La plus âgée des ambulancières avait été garde-malade pour une dame très riche mais surtout très dépressive qui passait ses journées à se morfondre sur elle-même tout en continuant à brasser de l'argent. Cela avait été difficile pour l'ambulancière de subir cet état dépressif et ne pas arriver à faire quoi que ce soit tout en voyant la famille tourner autour comme des rapaces. Elle avait préféré partir au bout de 2 ans malgré un bon salaire et quelques avantages.

Si vous trouvez vos enfants pénibles, lisez la suite. J'ai transporté un enfant de 5 ans sur qui le sort s'acharne. A peine né qu'il a du être opéré d'une transposition des gros vaisseaux avec sténose de l'artère pulmonaire. Dans les suites opératoires, les cardiologues ont du l'équiper d'un pacemaker à 6 mois de vie. Deux ans plus tard, découverte d'une surdité bilatérale puis d'une anosmie et enfin d'une hypermétropie. Le voici ainsi à 5 ans équipé de lunettes, d'appareils auditifs et d'un pacemaker. Comme un petit vieux... Pauvre petit bonhomme. Il fallait qu'il rentre chez lui après que les médecins ait diagnostiqué une trombe-phlébite cérébrale après qu'il ait fait une crise convulsive. Ainsi, il se retrouvait en plus sous anti-coagulant... Vraiment comme un petit vieux, quoi. Evidemment, il y a surement une maladie orpheline derrière ou une anomalie génétique. Mais la mère qui nous accompagnait m'a précisé que pour l'instant rien n'avait été retrouvé et que le généticien qui suivait son fils continuait à chercher. Heureusement, le petit ne souffrait d'aucun retard mental et poursuivait une scolarité normale. Sa mère était gentille mais ne cédait pas à ses moindres caprices et essayait de positiver : elle me disait que cela pourrait être pire et qu'elle avait vu un enfant souffrant d'une malformation de sa moelle épinière l'empêchant de se déplacer. Il était condamné à vivre dans un fauteuil roulant. Même pas sur qu'il puisse le manoeuvrer tout seul.
Pendant le trajet, j'ai pris le temps de lire son dossier. Les médecins qui avaient pris en charge son fils ont pris le temps de contacter le généticien qui a alors évoqué un CACH syndrome. Ce dernier conduit au décès du malade au bout de quelques années. Si le généticien avait vu juste, le petit qui était à côté de moi était condamné et a priori, la mère n'en savait rien... Effectivement, cela paraissait difficile de le lui dire. Fallait-il le faire car elle a le droit de tout savoir sur l'état de santé de son enfant et pour qu'elle puisse en profiter pleinement mais au risque que l'enfant n'ait pas une enfance normale ou ne rien dire pour que la famille puisse mener une vie "normale" et se battre pour lui ? C'est tout le problème de l'annonce de ces maladies incurables... Le garçon lui, avait l'habitude d'aller et de vivre à l'hôpital entouré continuellement de personnes en blouse blanche.

Je trouve que de telles rencontres permettent de relativiser et de se rendre compte que finalement on n'est pas si à plaindre...